INSTITUT SUPERIEUR INDUSTRIEL DE BRUXELLES

colloque " Energie et developpement durable "

11 octobre 2000

"Vers un Déclin de la Production Pétrolière"

Jean Laherrère
e-mail: jean.laherrere at wanadoo.fr

Introduction

La prévision est un art difficile comme le montre la météorologie où les données sont nombreuses, mais la prévision des productions futures sur des données incertaines de par une connaissance limitée des gisements, mais surtout biaisées par la politique, devient presque une tâche impossible. Publier les chiffres de production ou de réserves est un acte politique, car cela dépend de l’image que l’auteur veut donner de sa compagnie ou de son pays. Les données publiées sont différentes des données techniques, car elles sont choisies, dans une fourchette large d’incertitude, soit vers le minimum quand on veut éviter les taxes ou montrer plus tard une croissance, soit vers le maximum quand on veut obtenir des quotas élevés (OPEP), mais c’est rarement la valeur moyenne, base des calculs économiques de la décision de développement.

Il n’y a pas de consensus sur les définitions et les quelques règles sont ambiguës, ce qui plait aux acteurs qui peuvent ainsi déclarer ce qui leur convient. Les données publiées sur les productions et les réserves sont tres différentes suivant les sources.

Mauvaises définitions, mauvaises pratiques de publication, ainsi que les incertitudes géologiques et physiques, techniques, économiques, combinées aux aléas politiques conduisent donc à une prévision très médiocre des productions futures.

Les méthodes d’estimation du potentiel des bassins (réserves découvertes plus réserves à découvrir) sont multiples et peuvent être combinées, mais elles sont fiables pour des domaines naturels (système pétrolier) dont le degré de maturité est avancé, ce qui est le cas des principaux bassins pétroliers. Si le domaine est complet et naturel avec un grand nombre de gisements, le potentiel peut être évalué avec une bonne fourchette quand les gisements sont produits à pleine capacité (non-swing producers = monde hors Golfe Persique).

Il y a souvent confusion entre ressources (ce qui est dans le sol) et réserves (ce qui sera produit), entre pétrole et liquides, entre gaz produit et gaz vendu. La distinction entre pétrole conventionnel et pétrole non conventionnel est primordiale, mais encore là tres floue.

De même que les données, les prévisions en provenance des agences nationales sont encore plus biaisées par la politique et de nombreux exemples seront montrés.

Le problème majeur est donc d’obtenir des pays producteurs des données cohérentes, homogènes, complètes sur la production des champs et leurs réserves pour le brut, condensat, liquides de gaz, gaz associe et non-associe. Il faudrait que les données techniques soient obtenues et regroupées dans un organisme dépendant des Nations Unis pour être disponibles pour chacun sur Internet (Tempest 2000).

Les pays consommateurs surestiment les réserves pétrolières mondiales dans l’espoir de faire baisser les prix et l’OPEP en fait de même dans l’espoir de diminuer le progrès des économies d’énergie et des renouvelables !

-Incertitude sur les données

-produits:

Le brut peut inclure le condensat, les liquides de gaz, le conventionnel ou non, l’huile synthétique et le gain de raffinerie

L’offre est différente de la demande à cause des stocks :

USDOE/EIA STEO Aug. 2000

1999

2000

Demande mondiale Mb/d

74,8

75,8

Offre mondiale Mb/d

73,9

76,6

Aux Etats-Unis, l’importance des liquides de gaz naturels (LGN) (24%) et des gains de traitement en raffinerie (12%) doit être noté:

US: offre pour 1999

Mb/d

% offre

% production

brut & condensat

5,9

30

76

liquides gaz naturel

1,8

9

24

total production des liquides

7,7

40

100

importations

9,9

51

128

gain traitement

0,9

5

12

retrait stocks

0,3

2

4

alcool

0,4

2

5

autres

0,3

2

4

total offre

19,5

100

253

Le brut est donné aux Etats-Unis avec le condensat qui se dépose en surface au séparateur en tête de puits. Les liquides de gaz naturel sont extraits des gaz dans des usines de traitement. Beaucoup de pays ne traitent pas le gaz (une partie est torchée) et dans le monde, les liquides de gaz ne représentent que 8% du total (brut, condensat, liquides de gaz) (contre 24% aux US), mais ce pourcentage augmente, il n’était que de 5% en 1980. Les condensats viennent aussi bien des champs d’huile que des champs de gaz (gaz associé ou non associé).

Pour le monde, le brut

Monde : pourcentage %

1980

1990

1998

brut+condensat

93

91

89

liquides d’usine de gaz naturel

5

7

8

autres

0,1

0,5

1,1

gain raffinerie

1,6

1,8

2,0

tous liquides

100

100

100

Pour l’OPEP, comme les condensats ne sont pas compris dans les quotas, on peut avoir le détail brut et condensats. Le pourcentage de condensat varie de 0% (Golfe Persique) à 35% (Algérie).

OPEP : %C/(O+C)

1980

1990

1998

Algérie

9

35

35

Indonésie

5

12

12

Nigeria

0

3

5

Qatar

0

0

5

Emirats Arabes Unis

0

2

3

OPEP

1

3

3

Venezuela

1

2

1

Iran

0

0

1

Irak, Kowait, Libye, Arabie Saoudite

0

0

0

L’inventaire de l’offre et de la demande n’est pas facile, et n’est pas fiable. L’Agence Internationale de l’Energie (AIE) à Paris est considérée comme la meilleure source, mais de nombreuses erreurs ont été faites. Le prix anormalement bas de 10$/b en 1998 est dû à la mauvaise décision de l’OPEP d’augmenter les quotas en pleine crise asiatique, mais surtout à la surestimation par l’AIE de l’offre (300 à 600 Mb) ("missing barrels" Simmons 2000). Cette surestimation avait conduit de nombreux analystes à conclure que le monde était entré dans un long terme de prix bas.

Le terme pétrole ou brut peut inclure ou non de nombreux items et les chiffres varient suivant les sources. Pour la Norvège, malgré les chiffres officiels du NPD (Norwegian Petroleum Directorate) (2,9 Mb/d en 1999 pour le brut, 3,1 Mb/d pour brut + condensat), BP donne 3,2 Mb/d

Figure 1: Norvège: production de pétrole

Pour le Canada, les divergences sont bien plus grandes à cause du pétrole non conventionnel des sables bitumineux de l’Athabasca. Pour 1999, Oil & Gas Journal (OGJ) donne 2,1 Mb/d, NEB (National Energy Board) 2,1 Mb/d pour brut & équivalents, Petroleum Economist 2,2 Mb/d, BP & World Oil (WO) 2,6 Mb/d et NEB 2,9 Mb/d pour tous les liquides. La fourchette est de 1 à 1,5.

Figure 2: Canada: production de pétrole

La production de pétrole mondiale est donnée, soit 66 Mb/d (brut plus des condensats), soit 76 Mb/d (liquides) suivant les auteurs qui ne précisent souvent pas ce que cela représente.

La production de pétrole publié par l’USDOE détaille les volumes mensuels de brut (http://www.economagic.com/doeme.htm), séparant les liquides de gaz naturel. On voit que le Non-OPEC plafonne à 40 Mb/d depuis 1987, que le monde hors le Golfe Persique qui représente tous les pays produisant à pleine capacité (non-swing producers) semble aussi plafonner en 1997. Le monde après un pic en 1979 à 62 Mb/d n’a retrouvé cette valeur qu’en 1996 et a un deuxième pic en 1998 (pic caché par l’huile synthétique des pétroles non-conventionnels et les liquides de gaz).

Figure 3: Production de brut du monde et de l’OPEP

-valeurs: unités, volume, tonnage

Les unités de mesure de production varient. Le baril n’est même pas une unité officielle américaine et les agences fédérales sont obligées d’ajouter après baril (42 US gallons). Le sigle bbl est utilisé par certains sans savoir ce que cela représente, c’est-à-dire le blue barrel de brut pour le distinguer du red barrel (rbl) de produit raffiné. L’Angleterre utilise des tonnes pour le brut, la Norvège des mètres cubes pour le brut et le condensat, mais des tonnes pour le NGL (natural gas liquid). Le passage du tonnage au volume nécessite de connaître la densité du brut, or celle-ci varie avec les champs et pour un champ avec le temps. D’où des petites variations dans les bases de données suivant la conversion (par champ ou globale). Nous avons privilégié le baril, car les 40 000 champs qui sont dans mon ordinateur sont donnés en barils et en pied cubes.

Il y a un grave problème d’équivalence pour convertir les combustibles fossiles (et les autres énergies) en unité équivalente, en principe l’unité SI d’énergie, de travail et de chaleur est le Joule, mais la tep (tonne équivalent pétrole) est aussi utilisée (en France 1 tep=42 GJ) ainsi que le Btu (british thermal unit) en pays anglo-saxons (rappelons que la calorie est une unité périmée). Le gaz est converti en brut aux US avec l’équivalence calorifique 1 bep=6 (ou 5,6) kcf, mais au Canada avec l’équivalence-prix au consommateur (burner tip) 1 bep= 20kcf en 1991. Nous prenons l’équivalence simplifiée 1 bep=10 kcf pour compenser pour le coût élevé du transport du gaz (6 à 10 fois plus que le brut). Pour l’électricité c’est pire 1 MWh= 0,083 tep pour le monde et 0,22 tep pour la France (équivalence à l’entrée ou à la sortie?). La chaleur peut être un objectif ou une nuisance.

L’industrie pétrolière, dominée par les Américains, est particulièrement conservatrice et réfractaire aux changements intellectuels comme passer au système métrique. Les Français ne sont pas en reste et utilisent le gigamétre (Gm3 soit 1027 m3) pour représenter le milliard de mètre cube (109 m3 ou km3), alors qu’il correspond à environ un million de fois le volume de la terre. Le préfixe M est utilisé pour le millier par les Américains alors que toute le monde a parlé du Y2K bug et non Y2M!. La sonde Mars Climate Orbiter a été perdue lors de sa descente parce que les instructions de poussée ont été envoyées par la Nasa en newtons, alors que Lockheed l’avait programmé en livres!

-incertitude géologique, géophysique, physique, technique, économique

Il faut forer pour découvrir du pétrole et il faut un certain nombre de puits pour évaluer correctement les ressources d’un champ. Les valeurs ponctuelles obtenues sont extrapolées sur toute la surface du gisement grâce à des études géophysiques, principalement sismiques (2D ou 3D). Les caractéristiques du réservoir (quelques dizaines de mètres) mesurées par les carottes des puits espacés de quelques kilo (hecto) mètres ne sont qu’imparfaitement connues sur toute la surface. Le déclin de la production donne des données supplémentaires pour connaître les réserves qui sont en fait le cumul des productions futures jusqu’à l’abandon du champ. Cette production dépend des techniques futures adoptées (récupération améliorée), des coûts et du prix futurs, là encore incertitude, sans compter avec les aléas politiques (changement de fiscalité).

La courbe de probabilité des réserves d’un champ présente une distribution souvent proche de lognormale comme le graphique suivant, ou l’on peut choisir un minimum, un mode, une moyenne et un maximum. Le terme prouvé varie entre 50% et 95%, le prouvé+probable entre 40% et 75% et prouvé+probable +possible entre 5 et 15%.

Figure 4: Probabilité d’existence des réserves d’un champ

-définitions ambiguës et non consensuelles

Publier le chiffre de ses réserves est un acte politique pour la plupart des acteurs, car il dépend de l’image que l’on veut donner (riche ou pauvre). Il n’y a aucun consensus sur les définitions. Les définitions genre SEC (Securities and Exchange Commission) obligatoires pour les compagnies cotées en bourse aux Etats-Unis sont suffisamment ambiguës (reasonable certainty to exist) (à rapprocher de la "reasonable certainty of no harm" pour la Food & Drug Administration pour l’autorisation de la vente d’un produit) pour pouvoir publier ce que l’on veut. Chacun définit le raisonnable à sa façon. Les quotas OPEP dépendent des réserves depuis 1986 et l’on a alors assisté de 1987 à 1990 à une quasi doublement des réserves des pays de l’OPEP (+300 Gb) sans découverte majeure. La Zone Neutre n’a pas augmenté car dépendant en moitié du Kowait qui a augmenté en 1985 et en moitié de l’Arabie Saoudite qui a augmenté en 1990. Le Nigeria opéré par des compagnies internationales n’a pas augmenté ses réserves pour augmenter ses quotas car produisant à pleine capacité alors que le Venezuela l’a fait, mais après avoir fait des découvertes significatives (Furrial).

Figure 5 : Réserves de l’OPEP par membre d’après l’American Petroleum Institute (API)

Les règles SEC aux EU obligent à négliger les probables pour plaire aux banquiers et aux actionnaires qui n’aiment pas le risque, mais la croissance. Cette mauvaise pratique conduit à des révisions importantes et continues, qui représentent plus de 90% des additions annuelles, laissant moins de 10% aux nouvelles découvertes. C’est une très mauvaise pratique qui conduit à un optimisme faussant une bonne prévision des problèmes, et conduisant à une estimation de 76 Gb de "reserve growth" pour les Etats-Unis (USGS 2000). L’USGS veut extrapoler ces pratiques au reste du monde (potentiel de 612 Gb de reserve growth) qui heureusement utilisent des méthodes plus scientifiques (approche probabiliste). Il y a bien une croissance des réserves des champs déjà découverts de certains pays mais aussi une diminution dans d’autres (le Mexique a diminué de 20 Gb les estimations du passé, révision négative qui a été enregistrée par WO en 1997 et par OGJ en 1999). Khalimov, qui a présenté la classification russe en 1979, reconnaissait en 1993 que les réserves de l’URSS étaient grossièrement exagérées en ne tenant pas compte de l’économie et de la technique, et l’on doit donc s’attendre à une future révision négative (de l’ordre de —30% : Laherrere 2000) des réserves de l’ex-URSS. Les réserves de l’OPEP qui ont été gonflées pour les quotas pourraient être aussi révisées à la baisse.

-Publications des données

-données publiées différentes des données techniques

La décision de développer un champ important (surtout en offshore) nécessite des études économiques approfondies utilisant des calculs de probabilité et des fourchettes (mini, mode, moyenne, maxi). La valeur nette actualisée en monnaie tient compte de toute la gamme de probabilité des réserves et des investissements correspondants. Mais de la fourchette d’incertitude, un seul chiffre est choisi pour être publié à l’extérieur. L’objectif des compagnies pétrolières est d’obtenir une croissance suffisante des réserves et de la production (si elle n’est pas là, on se rabat sur les fusions), il convient donc de sous-estimer une découverte importante pour la faire grossir plus tard (en clamant des progrès techniques) et de surestimer les découvertes mineures pour justifier son développement marginal.

-approche probabiliste et approche déterministe

Si l’approche probabiliste est une nécessité en offshore pour justifier de l’installation d’une plate-forme importante, les développements terrestres se font puits par puits avec des investissements qui s’étalent dans le temps en fonction des productions. Une approche déterministe est favorisée aux US ou les réserves sont calculées par puits en fonction de l’épaisseur utile, du rayon de drainage (spacing) et du taux de récupération des champs voisins. En cours de production, la règle du pouce la plus utilisée est de prendre les réserves restantes égales à 10 fois la production annuelle. Les consultants texans ont horreur des probabilités qu’ils connaissent mal. Il faut reconnaître que l’estimation de la probabilité de réserves d’un champ est toute subjective car chaque champ est différent et les statistiques d’un bassin peuvent être trompeuses. Mais il vaut mieux savoir que l’on ne sait pas, que de croire que l’on sait. Toutefois l’approche probabiliste devient très difficile quand on procède à des simulations du champ à développer comportant jusqu’à 100 000 cellules.

-réserves = production future: biaisées par politique (OPEP=quotas)

Les publications les plus utilisées pour les réserves sont celles des magazines World Oil (WO) et Oil and Gas Journal (OGJ) après enquête auprès des compagnies nationales, et l’USDOE publie pour les réserves mondiales les deux estimations différentes sans prendre parti.

réserves mondiales dites prouvées Mb fin 1999 :

World Oil

978 868,2

Oil & Gas Journal

1 016 041,221

Donner 10 chiffres significatifs (OGJ) pour une mesure aussi imprécise montre bien l’incompétence des auteurs de cette évaluation, surtout que le premier chiffre est douteux (toute publication de chiffre pétrolier devrait se contenter de deux chiffres significatifs (trois à la rigueur)).

Surtout que l’OGJ fait son enquête sur les réserves de fin d’année avant la fin de l’année, mais tout pays sérieux n’a pas encore fait ses analyses et ne répond pas. Alors ce pays est considéré comme sans changement (cas de 78 pays (dont la France et le Canada) totalisant 659 Gb). Seuls répondent les pays où les estimations sont politiques et seulement 27 pays (totalisant 357 Gb) sont considérés comme ayant varié avec une diminution de —18 Gb soit —5% mais la diminution est considérée sur le total global, soit seulement —1,8%. Ces données sont donc une "farce", mais ils sont repris par BP Review (et l’American Petroleum Institute) et la caution d’un compagnie aussi connue que BP les fait adoptés comme sérieux par la plupart des économistes. Alderman (MIT) prétendait que le Non-OPEP avait fortement augmenté depuis 1989 en se basant sur les données BP, il avait oublié de lire les notes en minuscules, car ce qui était Non-OPEP* représentait en fait le Non-OPEP excluant l’ex-URSS!

En outre, l’addition des réserves prouvées (probabilité de 90%) par pays pour obtenir le monde donne une probabilité de plus de 95% d’existence et les réserves prouvées du monde doivent être supérieures à l’addition des prouvées par pays. Seule la somme des réserves moyennes par pays (ou par champ) est égale aux réserves moyennes du monde (ou du pays).

Le graphique suivant montre l’évolution des réserves restantes mondiales suivant les publications. World Oil a tenté de passer aux réserves prouvées plus probables en 1991, mais est revenu aux prouvées. American Petroleum Institute (API) est proche de OGJ. L’évolution des prouvées (où une partie des probables qui sont négligées deviennent prouvées) donne une fausse image suite à une mauvaise pratique provenant des règles de la SEC. On voit très bien le saut de +300 Gb de 1987 à 1989 résultant de l’installation des quotas de l’OPEP. Les réserves prouvées plus probables (2P) de Petroconsultants (en provenance des techniciens) (l’achat de cette base de ces données confidentielles est très onéreuse et hors de portée des universités et des économistes) qui sont ramenées à l’année de découverte (backdated) donne une meilleure image de l’évolution des découvertes et les réserves baissent depuis 1980 (le décalage de 1988 est dû à un changement de définition du produit en ajoutant des liquides). Le 2P de Petroconsultants est inférieur au P de WO et OGJ, montrant bien que ces réserves dites prouvées sont surtout des réserves publiées par les politiques

Figure 6: Réserves restantes mondiales de brut d’après des sources diverses

Le graphique embrouillé sur le Royaume-Uni (UK) et la Norvège montre que les estimations de WO et OGJ sont erratiques, mais se rejoignent pour les dernières années à 10 Gb pour la Norvège et 5 Gb pour UK. Seul Petroconsultants montre une évolution cohérente pour aboutir vers 15 Gb pour chaque pays. Les productions actuelles des deux pays sont très proches (3 Mb/d), en contradiction avec des réserves du simple au double de WO et OGJ, mais en accord avec l’égalité des réserves d’après Petroconsultants.

Figure 7: UK et Norvège: réserves restantes de brut d’après des sources diverses

-Estimation des réserves ultimes par modélisation

La sélection du domaine étudiée est très importante pour l’analyse de la distribution. Le domaine doit représenter la totalité d’un domaine naturel (ou un très grand nombre de domaines naturels). Auparavant, la classification des bassins pétroliers était sur la base tectonique, mais depuis plus de 20 ans la classification qui s’est imposée est le Système Pétrolier basé sur l’origine du pétrole, c’est-à-dire la roche-mère qui l’a engendré. Le premier rapport mondial sur cette base a été notre rapport de 1994 (Laherrere, Perrodon (le premier géologue qui a parlé de Système Pétrolier) et Demaison (le premier géochimiste qui a quantifié la génération d’un Système Pétrolier)

-distribution taille-rang log-log = fractale parabolique

Mandelbrot, qui a créé le terme fractal pour représenter l’auto-similarité de la Nature, reprenait les graphiques de Zipf qui donnait un tracé linéaire pour une distribution log-log taille-rang (par ordre de taille décroissant), notamment pour les réserves pétrolières. Mais ce graphique n’avait que quelques points pour les réserves pétrolières et un tracé avec des données plus détaillées montre un tracé courbe, correspondant à un imparfaite (limitée) autosimilarité de la Nature. Cette courbure se retrouve pour pratiquement tous les systèmes naturels (Laherrere 1996): agglomérations urbaines, langages, galaxies, tremblements de terre, et a été décrit souvent comme comportant plusieurs droites ou multifractal. La distribution des réserves des champs du système pétrolier (même roche-mère) du delta du Niger est un bon exemple de courbure continue et cohérente. L’évolution avec le temps (tous les dix ans) montre que les plus gros champs sont découverts les premiers et que le tracé tend vers une courbe ultime proche d’une parabole (la courbe la plus simple). Cette courbe ultime représente tous les gisements qui se trouvent dans le sous-sol mais tous ne seront pas découverts ni exploités et il convient d’appliquer des contraintes de temps (l’exploration va cesser dans quelques décennies) et d’économie.

Figure 8: Réserves du delta du Niger: distribution fractale parabolique

Autrefois la distribution la plus employée pour représenter un bassin pétrolier était la distribution lognormale, mais elle a l’inconvénient de prévoir autant de gros que de petits, ce qui n’est pas réaliste. On peut aussi utiliser un modèle d’exponentielle étirée (Laherrere & Sornette 1998) ou les trois à la fois (Laherrere 2000c).

Certains, comme l’étude Robertson 2000, utilisent l’étude fractale des systèmes pétroliers du monde, mais ils utilisent une fractal linéaire en tronquant les plus gros champs (les plus importants et qui sont pratiquement tous découverts), négligeant la meilleure part des données.

-courbe d’écrémage

Un seul modèle est insuffisant. Une autre approche est très utile, c’est la courbe d’écrémage (creaming curve de Shell) qui correspond à la loi des rendements décroissants en exploration minière. La courbe des découvertes cumulées en fonction du nombre cumulé de puits d’exploration (New Field Wildcat) d’un domaine naturel est proche d’une hyperbole avec en asymptote les réserves ultimes.

La courbe d’écrémage du delta du Niger montre bien une courbure hyperbolique et que les 20 premiers Gb ont été découverts avec 400 puits (de1954 à 1968), mais les 20 suivants (38 Gb ont été découverts) vont demander plus de 1200 puits. L’asymptote est de 62 Gb, ce qui veut dire qu’il faudra une infinité de puits pour l’atteindre. Le nombre de découvertes est lui linéaire, montrant que la taille des découvertes décroît avec la maturité de l’exploration.

La combinaison interactive de la courbe d’écrémage et de la fractale parabolique permet de mieux cerner les réserves ultimes.

Figure 9: Découvertes de brut du delta du Niger: courbe d’écrémage

Lorsque les données de puits d’exploration manquent, on peut se contenter de la courbe d’écrémage en fonction du temps qui est, elle, perturbée par les à-coups de l’exploration (au Nigeria pendant la guerre civile). La courbe ressemble à une courbe logistique, mais l’asymptote est plus difficile à cerner. Le nombre de découvertes est lui erratique.

Figure 10: Delta du Niger: courbe d’écrémage en fonction du temps

-production annuelle: corrélation avec découverte annuelle décalée, modèle d’Hubbert

Hubbert (géophysicien de Shell et de l’USGS) avait prédit en 1956 que la production de pétrole aux Etats-Unis culminerait en 1970 (ce qui s’est réalisé). Il prenait comme hypothèse que la courbe de production ressemblait à la courbe de découverte avec un certain décalage. Il prévoyait que la courbe était proche d’une courbe symétrique (dérivé de la courbe logistique). La courbe des découvertes annuelles pour les 48 Etats (moyenne déduite des données prouvées corrigée par la fonction MMS de croissance des réserves prouvées des champs du Golfe du Mexique) corrèle bien avec un décalage de 30 ans avec la production annuelle.

Figure 11: US (48 states) production annuelle et découverte décalée de 30 ans

La production des Etats-Unis (48 Etats) et de l’ex URSS (FSU) est modélisée avec la courbe d’Hubbert et le résultat est satisfaisant, sauf aux périodes où les conditions économiques subissent un changement important: US= dépression et proration 1930, proration 1959, choc pétrolier 1980 et FSU = problèmes intendance 1990. Mais l’Alaska est à mettre à part, survenant comme un nouveau cycle d’exploration et de production.

Figure 12: Modélisation de la production de brut aux Etats-Unis et ex-URSS

Les Etats-Unis et l’ex URSS sont des pays où se trouvent un grand nombre de bassins pétroliers et de champs et où l’activité d’exploration a été continue depuis 100 ans (pour les 48 Etats). L’explication de la courbe symétrique se trouve dans le "Théorème de central limite" où la somme d’un grand nombre de distributions dissymétriques indépendantes tend vers une distribution normale (ou de Gauss). La courbe d’Hubbert (dérivé de la courbe logistique) est très proche de la courbe de Gauss. On comprend bien que les larges variations économiques perturbent la courbure de la production, car alors les productions individuelles ne sont plus indépendantes.

Mais dans les plus petits pays où l’exploration est moindre et sujette à plusieurs cycles, la production suit également plusieurs cycles symétriques. C’est le cas de la France avec deux cycles de production symétriques corrélant bien avec les deux cycles d’exploration après décalage de 7 ans.

Figure 13: Production de brut en France: production et découverte décalée de 7 ans

C’est le cas des Pays-Bas avec 3 cycles, le premier est le cycle terrestre et les 2 suivants des cycles offshore, le décalage est ici autour de 6 ans, la corrélation est moins bonne car il y a moins de champs.

Figure 14: Production de brut aux Pays-Bas: production et découverte décalée de 6 ans

La corrélation découverte-production pour le monde hors Golfe Persique (à savoir tous les pays produisant à pleine capacité) est bonne avec un décalage de 30 ans. Le pic des découvertes était dans les années 1960. On a donc une prévision de 30 ans sur la production en regardant le déclin des découvertes. La courbe de tendance des découvertes montre un pic plus fort que celui de la production (un bon nombre de découvertes sont toujours non développés), mais le déclin des découvertes est en bon accord avec la courbe d’Hubbert calée sur la production. Le monde hors Golfe Persique est au pic de production (un sommet est toujours un peu bosselé!) et doit décliner prochainement. On ne s’aperçoit de l’existence du pic que lorsqu’un déclin net est amorcé. Ce graphique est présenté dans le rapport du Conseil Mondial de l’Energie

Figure 15: Monde hors des producteurs d’appoint: production et découverte décalée de 30 ans

La mer du Nord a été le contrepoids de poids (avec le Mexique et la Russie) aux premiers chocs pétroliers et son déclin sera un choc psychologique important. Quand va décliner la mer du Nord?, à savoir la production UK + Norvège (en négligeant la production terrestre du Royaume-Uni). La corrélation de la découverte décalée de 13 ans avec la production n’est pas très bonne, car la production (<6 Mb/d) vient surtout de quelques grands champs (production maxi en Mb/d: Statjford 0,74, Gullfaks 0,53, Forties 0,52, Oseberg 0,50, Brent 0,44, Ninian 0,30, Piper 0,28)

La production de UK est composée de 2 cycles alors que celle de Norvège n’en a qu’un.

Figure 16: UK + Norvège: production et découverte décalée de 13 ans

Il est possible de tracer deux courbes d’Hubbert pour prévoir la production future à partir des installations actuelles. La production cumulée à fin 1999 est de 31 Gb. Le modèle a une production cumulée 2000-2030 de 15 Gb alors que les réserves restantes sont supérieures.

Y aura-t-il une troisième cycle avec de nouvelles installations et découvertes?

Figure 17: UK + Norvège: prévisions production de brut

-Découverte et production mondiale

J’ai essayé d’homogénéiser autant que possible les différents fichiers hétérogènes pour obtenir les réserves moyennes (prouvé+probable) par champ telles qu’estimées actuellement et reportées à l’année de découverte (Laherrère 1999c). Les découvertes annuelles et les productions annuelles sont reportées depuis 1950. Le pic de découvertes de pétrole a été dans les années 60 avec une moyenne supérieure à 50 Gb/a alors que dans les années 90 la moyenne a été moins de 10 Gb/a. La découverte en 1971 du champ de South Pars en Iran (250 Tcf et 6 Gb condensat) est une fausse découverte car il est l’extension du champ de North Field au Qatar (350 Tcf et 11 Gb condensat) découvert en 1971, donnant le plus grand champ de gaz au monde (600 Tcf et 17 Gb), le suivant Urengoy en Sibérie ne fait que 350 Tcf et 4 Gb condensat. Il s’avère que l’on produit actuellement 25 Gb/a de pétrole et que l’on ne découvre que 10 Gb/a. Par contre pour le gaz, on produit 80 Tcf/a et l’on découvre à peu près autant.

Figure 18: Monde: découverte et production annuelle de pétrole et de gaz

Comme le Golfe Persique ne produise pas à pleine capacité, la corrélation production et découverte est moins bonne pour le monde que pour le monde hors Golfe Persique, toutefois une corrélation avec un décalage de 45 ans entre découverte et production mondiale laisse prévoir un déclin après 2010.

Figure 19: Monde: brut et condensat: découverte décalée de 45 ans et production

-Réserves ultimes (conventionnelles)

La prévision des productions futures annuelles nécessite de connaître les réserves ultimes (qui représente la production cumulée jusqu’à la fin de la production de pétrole). Les estimations publiées des réserves conventionnelles ultimes mondiales sont reportées sur le graphique suivant. L’estimation de l’USGS 2000 est d’un optimisme injustifié car basée sur une croissance des réserves déjà découverts (>700 Gb) en prenant pour le reste du monde la croissance des réserves américaines, alors que la pratique d’estimation dans le reste du monde est toute autre. En négligeant la dernière estimation de l’USGS, la tendance depuis 1960 est un peu au-dessus de 2 Tb= 2000 Gb et pour le gaz 12 000 Tcf.

Figure 20: Historique des estimations des réserves ultimes mondiales de pétrole et de gaz

Il faut rappeler que l’addition d’un millard de barils aux réserves ultimes retarde le pic de seulement une semaine.

La courbe de production de pétrole (brut + condensat) cumulée est extrapolée avec un modèle logistique correspondant à notre ultime de 2000 Gb dans la figure 20 bis ainsi que la courbe de découverte cumulée. Les courbes de découverte et production cumulée de gaz extrapolée avec un ultime de 10 000 Tcf sont aussi représentées.

Figure 20 bis

-Impact du prix du brut et de la technique sur les réserves

Les économistes ont une confiance illimitée dans la nouvelle technologie (c’est le père Noël). Mais ils refusent d’écouter les techniciens comme nous. Ils considèrent que les réserves augmentent avec les prix, faisant la confusion avec l’exploitation minière où les réserves dépendent de la teneur de coupure économique, qui dépend des prix. Un gisement de pétrole produit du brut (et de l’eau) (en fait, on ne produit pas le pétrole, mais on l’extrait), et l’on extrait tout ce qui peut être extrait. Comme disait Frankel "oil is liquid". L’impact du prix ne joue que pour les champs non développés (mais il n’y a alors pas de réserves prouvées mais des réserves probables) et pour le pétrole non-conventionnel, qui lui ne coule pas spontanément. De plus, quand le prix du brut augmente, le coût des services augmente aussi et les gisements marginaux le restent. Le meilleur exemple est le coût du pied foré aux Etats-Unis qui varie d’une façon linéaire avec le prix du brut en tête de puits (décalé d’une année).

On ne voit pas d’amélioration du coût avec le temps c’est-à-dire les progrès technologiques.

Figure 21: Coût du pied foré aux Etats-Unis en fonction du prix du brut

Il y a eu une diminution des coûts en mer du Nord, mais il a été surtout dû à la courbe d’apprentissage (qui n’existe pas aux US) et au contrechoc de 1986.

Quand de nouvelles techniques (et investissements) sont introduites sur un champ, cela accélère la production, mais a peu d’effet sur les réserves. La production annuelle de Forties est exemplaire, une cinquième plate-forme et du gaslift en 1987 a permis pendant deux ans de produire plus que le déclin des années précédentes, mais ensuite, retour sur la droite de déclin initiale décelable dès 1986. Il n’y a donc pas augmentation des réserves ultimes avec le gas-lift. La valeur de la droite de déclin (2,7 Gb) coïncide avec la valeur ultime publiée en 1999 (Institute of Petroleum)

Figure 22: Forties: déclin de la production de pétrole

Le graphique suivant montre l’évolution des réserves telles que données par Dromgoole (BP) et la production cumulée. Il est évident que les réserves estimées en 1986 à 2 Gb étaient trop faibles, mais on ne les a augmentées à 2,5 Gb que quand on a installé la 5e plate-forme pour lier l’augmentation aux progrès techniques, alors qu’en 1986 la droite de déclin donnait 2,7 Gb. En 1995 l’estimation de 2,5 Gb est trop faible vue la production cumulée à 2,35 Gb. Il est clair que la publication des réserves est guidée par des raisons politiques ou mercantiles (promotion de la compagnie).

Figure 23: Forties: production cumulée et estimation des réserves ultimes

Le plus grand champ de pétrole aux Etats-Unis hors Alaska est East Texas, découvert en 1930. Après l’introduction d’injection d’eau en 1962 et une remontée de la production, celle-ci a décliné de 1972 à 1986 avec une déplétion de 3,7%/a et l’ultime était donné de 1970 à 1990 à 6 Gb. Mais depuis 1986 le déclin a changé de pente et est passé à 7%/a et l’ultime est estimé en 1998 (OGJ) à 5,38 Gb (9000 puits produisant une moyenne de 8b/d). La droite de déclin donne une valeur ultime de 5,5 Gb.

Figure 24: East Texas: déclin de la production du pétrole

Il est donc évident que les nouvelles technologies n’ont rien apporté pour améliorer les réserves d’East Texas. On retrouve le même résultat sur le champ de Willington en Californie où l’injection d’eau, l’injection de vapeur et les puits horizontaux ont conservé le même déclin de 6%/a et le même ultime (2,8 Gb) et sur de nombreux autres champs (Samotlor en Russie).

Les économistes (et autres) qui chantent les louanges des nouvelles technologies (3D, puits horizontaux) pour augmenter les réserves, semblent ignorer que ces techniques ont plus de 20 ans et sont déjà utilisées sur la quasi-totalité des champs actuels. Ceux qui n’ont jamais découvert, ni produit, de pétrole font des déclarations fracassantes dans la presse: comme Claude Allégre 1996 (alors Président du BRGM avant d’être licencié le 2 avril 1997) "Aujourd'hui, on extrait en moyenne 20 % ou 30 % du pétrole. Avec l'imagerie sismique, on peut espérer, demain, extraire 80 % à 90 % d'un gisement". C’est "énorme", comme un mammouth! Dans une interview de Sydney à la télévision australienne ABC le 26 Août 99 entre Campbell (à Paris), Yamani (à Londres) et Yergin (à New York), Yamani a affirmé qu’en Arabie Saoudite le taux de récupération était de 30% et que l’on pouvait l’augmenter à 45% ce qui apporterait des réserves considérables. Yamani a des données périmées. Le plus grand champ du monde Ghawar a des réserves (ultimes) de 115 Gb avec un taux de récupération de 60%, car il y a de la sismique 3D (j’ai son image dans mon ordinateur) et de nombreux puits horizontaux.

Certains espèrent appliquer à tous les champs le taux maximum du meilleur champ. C’est ignorer que la récupération dépend essentiellement de la géologie du réservoir. Le taux maximum pour le pétrole est par exemple celui du récif d’Intisar en Libye avec plus de 80% sans effort particulier (la porosité et la perméabilité sont telles que ce gisement est comparable à une citerne, mais le déclin est très rapide 30%/a), alors qu’un gisement qui produit surtout par fracture aura un taux de l’ordre de 3%. On ne peut changer la géologie du réservoir et les méthodes les plus sophistiqués ne pourront atteindre 80% pour tous les champs.

Les premières estimations des réserves des champs en mer du Nord avaient fait l’hypothèse très conservatrice (en l’absence de précédent) que l’injection d’eau ne déplacerait que 70% du brut, mais la Nature a été généreuse dans les bons réservoirs et l’eau injectée a poussé la totalité du brut vers les puits producteurs, on a augmenté les réserves en prétendant que c’était dû à de nouvelles techniques, alors que c’était une correction d’une hypothèse sous-estimée. Il n’y aura donc pas sur ces champs de potentiel de récupération améliorée.

Les patrons des compagnies pétrolières s’expriment peu sur le futur déclin du pétrole, sauf quand ils quittent l’industrie pétrolière comme Bernabé (ENI) juin 1998: " Cheap oil : enjoy it when it lasts ", Bowlin (ARCO) février 1999 " The last days of the age of oil ". Mais un patron en exercise Browne (BP) juillet 2000 après la fusion avec Amoco et Arco a introduit le nouveau logo BP comme signifiant " Beyond Petroleum " pour montrer leurs efforts vers le renouvelable.

-Energie nette et subventions

Dans le pétrole non-conventionnel, on parle de ressources considérables et d’espoir que la technique pourra tout faire. Mais il ne faut pas oublier que, bien sur, on pourrait récupérer 100% du brut d’un champ si on l’exploite en ciel ouvert, mais l’énergie dépensée pour le produire serait supérieure à l’énergie du produit extrait. C’est le cas de certains pétrole non conventionnel. De ces ressources considérables seulement une faible partie qui réunit toutes les conditions les plus favorables seront exploités en premier et ensuite la coupure du bilan énergétique (énergie nette positive) rejettera une bonne partie des ressources. Il ne faut pas confondre ressources et réserves.

Les subventions sont aussi très néfastes et faussent l’économie. Elles devraient être proscrites.

Le contrechoc pétrolier de 1986 a été un troc (Schweizer 1994) entre protection américaine au Moyen-Orient et pétrole bon marché sous la conduite de l’Arabie Saoudite (le seul pays qui a alors augmenté sa production). Si on reporte actuellement le coût de la protection américaine (50 G$/a) au volume de brut importé aux EU, on augmente celui-ci de 15$/b.

-Potentiel: offshore profond

A ce jour environ 30 Gb (soit 10% des découvertes offshore) ont été découverts en offshore profond (après 1982, bien que les bateaux à positionnement dynamique existaient depuis 1970 (Pélican), mais les premières recherches, notammen dans le Golfe du Lyon en France, furent décevantes) et l’on peut espérer en découvrir encore environ 50 Gb. Les zones productrices en offshore profond sont essentiellement le Golfe du Mexique, l’Ouest Afrique (Angola-Congo et Nigéria) et le Brésil, qui sont toutes une extension de zones productrices sur le plateau continental. Elles présentent toutes une tectonique très active de diapyrs (salifère pour le Golfe du Mexique, Angola-Congo et Brésil et d’argiles pour le delta du Niger) avec des réservoirs turbiditiques provenant d’un fleuve important (Mississipi, Congo, Niger). Il ne semble pas que ces conditions se retrouvent dans beaucoup d’autres zones dans le monde. On ne sait pas bien comment ces nouveaux réservoirs font se comporter, car il faut de fortes productivités (continuité et drainage par poussée d’aquifére). Le Golfe du Mexique a exploré l’offshore de plus de 300 m depuis 1974 et plus de 35 G$ ont été dépensés en acquisition de permis, exploration, développement et opérations, mais l’industrie est encore dans le rouge pour 15 G$ (Derman & Jacobson 2000), c’est loin d’être un pactole après plus de 25 ans d’efforts et de succés! Le champ de Macaroni par 1100 m d’eau est un développement sous-marin de Shell qui n’a pas atteint ses objectifs (15 000 b/d au lieu de 35 000 b/d) et que Shell vient de vendre.

-Prévisions

Chacun est intéressé non pas dans les réserves ultimes, mais par les prévisions de la production future au cours des 20 à 30 prochaines années. La référence au ratio R/P réserves restantes sur production actuelle de l’ordre de 45 ans est trompeuse quand on la présente comme avoir 45 ans sans problème d’offre. D’abord la production future sera différente de la production actuelle (USDOE prévoit 120 Mb/d en 2020 = 44 Gb/a alors que AIE et OPEP prévoient seulement 100 Mb/d = 36 Gb/a) et surtout la production de pétrole est soumise à un déclin, on ne peut passer d’un plateau constant pendant 45 ans à zéro le lendemain. De nombreux organismes donnent leurs prévisions pour 2020 sans donner leurs hypothèses sur les réserves ultimes et si leurs prévisions satisfont un déclin normal de la production. Un profil typique a été tracé sur les prévisions USDOE 2000 et AIE 1998 pour estimer les réserves ultimes nécessaires qui se montent à 4500 Gb pour les prévisions USDOE et 2600 Gb pour l’AIE.

Figure 25: Productions mondiale de pétrole et prévisions USDOE, AIE et réserves ultimes nécessaires

John Wood (2000) de l’USDOE présente 12 scénarios basés sur les réserves ultimes du rapport USGS 2000 à savoir 3003 Gb (ces 3 Gb semblent incongrus). Le scénario de croissance de 2%/a et de déclin à 2%/a est proche du scénario AIE avec un pic vers 2015. Par contre le scénario à 2%/a de croissance et un déclin avec R/P=10 ans (la pratique américaine depuis plus de 50 ans) soit un déclin de 10%/a est une insulte aux prochaines générations car cela veut dire que l’on produira au maximum (55 Gb/a = 150 Mb/d en 2037) pour en laisser le minimum (38 Mb/d en 2050) aux petits-enfants. Dans son rapport, Wood présente aussi notre scénario (voir figure 26 suivante).

Un groupe de géologues à la retraite: Perrodon, Demaison, Campbell, Laherrere ont rédigé de 1992 à 1998 quatre rapports totalisant 1250 pages, faisant la synthèse par système pétrolier des données individuelles par champ

-Laherrère, J.H. A.Perrodon, and G.Demaison 1994 " Undiscovered Petroleum Potential";

-Campbell C.J. & J Laherrère 1995."The world's oil supply -1930-2050"

-Laherrère J.H., A.Perrodon, and C.J.Campbell 1996 "The world's gas potential"

-Perrodon A., J.H. Laherrère and C.J.Campbell 1998 "The world's non-conventional oil and gas"

Les estimations de pétrole et de gaz ultimes sont les suivantes:

Perrodon et al 1998

mini

moyenne

maxi

Brut conventionnel Gb

1700

1800

2200

Liquides de gaz conventionnel Gb

200

250

400

Liquides non-conventionnels Gb

300

700

1500

Liquides ultimes Gb

2300

2750

4000

Gaz conventionnel Tcf

8500

10000

13000

Gaz non-conventionnel Tcf

1000

2500

8000

Gaz ultime Tcf

10000

12500

20000

Les schistes bitumineux qui représentent des ressources gigantesques ne sont ni des schistes, ni du bitume mais des roches-mères immatures qui ont besoin d’une pyrolyse vers 600°C pour générer du pétrole. Ils doivent êtres classés dans les charbons. Les schistes bitumineux ont été exploités depuis 200 ans (Chine 1700, Autun 1850, Ecosse 1850) et surtout en Estonie comme moyen de chauffage. Ils sont représentatifs pour le moment d’une énergie nette négative (Youngquist 1996, 1998), en plus d’un besoin en eau considérable et d’une pollution par un volume supérieur de "fines". Ils ont été montrés, il y a 20 ans, comme les réserves du futur, et ils risquent de le rester indéfiniment. Une nouvelle tentative actuellement en Australie par Suncor sur le pilote de Stuart (4500 b/d et 250 M$) rencontre des tas de problèmes.

Le seul point qui peut augmenter les ultimes de liquides est la conversion GTL (gas-to-liquid) à partir du procédé Fischer-Tropsch, procédé pour le moment expérimental (pilote Shell à Bintulu) et non économique. Il y a en effet des grandes réserves de gaz non développé car trop loin des marchés (le transport du gaz est 6 à 10 fois plus cher que celui du pétrole).

Le méthane des hydrates océaniques est une chimère (Laherrere 1999a et 2000a) (comme l’or dissous dans les océans), car les concentrations d’hydrates sont de 1 à 5% dans des argiles non compactées dans les deux zones les plus importantes en hydrates et les mieux explorées (Blake Ridge au large de la Caroline et Cascadia au large de l’Oregon). Les estimations des ressources mondiales qui les donnaient récemment supérieures aux combustibles fossiles viennent d’être réduites par 100, descendant au volume des réserves du gaz conventionnel (Soloviev 2000). Il ne faut pas confondre ressources et réserves. Le forage d’exploration en Novembre 1999 par la compagnie nationale japonaise JNOC dans le Nankai Trough par 950 m d’eau (avec 5 puits d’appréciation) a trouvé seulement 3 réservoirs sableux d’un total de 15 m contenant des hydrates avec une concentration de 20% (Petroleum Economist Aug2000 p31) d’après les carottes, mais des résultats chimiques donnant 80% avaient été avancés?. Comme toujours avec les résultats d’hydrates, plus de questions que de réponses. De plus, on ne sait pas comment les produire. Les hydrates sont surtout une nuisance, mais seront peut-être un moyen plus économique de transporter le gaz conventionnel.

A partir de nos ultimes de 2000 Gb pour les liquides conventionnels et 750 Gb pour les liquides non-conventionnels, le tracé de la production future avec trois courbes différentes prévoit un pic des liquides vers 2010. Bien sûr, le pic du non-conventionnel en 2060 est juste pour montrer qu’il demande de grands investissements et de délais très long comme un projet minier, donnant une courbe très étalée.

Figure 26: Prévisions production mondiales Perrodon; Laherrere, Campbell

-Consommations d’hydrocarbures par personne

Mais ce qui intéresse l’individu est la consommation future qui sera disponible par habitant. Pour cela il faut de bonnes prévisions sur la population future et les prévisions des Nations Unis sont en baisse constante depuis 1990. En 1990 les NU avait prédit que l’accroissement global qui était alors de 90 millions par an culminerait en 1998, en fait cet accroissement était déjà sur le déclin, il a culminé en 1988 et il est de 78 millions en 1999. La prévision de référence (dit medium) est pour un taux de fécondité de 2,1 enfant par femme soit le taux de remplacement conduisant à une population stable asymptotique. Cette hypothèse est irréaliste, il n’y a aucune raison que le taux tende vers cette valeur plutôt qu’une autre et les pays éduqués ont montré une baisse de la fécondité qui peut descendre sous 1,5 enfant par femme (Espagne 1,1). Le scénario low/medium est le plus vraisemblable et il correspond au modèle de Bourgeois-Pichat 1988 (directeur de l’INED) qui prévoit deux courbes symétriques (courbe normale comme pour les productions de pétrole), une pour les pays industriels et une pour les pays en cours de développement qui cherchent à imiter les pays industriels. J’ai rajouté une courbe pour les pays qui refusent le progrès (comme les Talibans). Le pic de la population mondiale se situera vers 2035 à moins de 8 milliards.

Figure 27: Prévision population mondiale des NU et modèle Bourgeois-Pichat

La combinaison des prévisions de production (=consommation) de pétrole et de gaz et de population conduit à la courbe de production par habitant. Il y a eu un pic en 1979 à 7 bep/hab. Après un creux, la courbe remonte vers un deuxième pic vers 2005 à 6,5 bep/hab. Le pic principal est donc derrière nous. Il faudra économiser le pétrole et finir de le considérer comme abondant et bon marché.

Figure 28: scénario production de pétrole et de gaz par habitant

Conclusions

Les données publiées sont trop dominées par la politique et elles devraient être plus fiables en étant regroupées au niveau des Nations-Unis.

La crise actuelle provient de l’impréparation des gouvernants et des compagnies qui refusent d’admettre la possibilité de déclin pétrolier en prétendant qu’il y a abondance de pétrole pour les 45 prochaines années, ainsi que du manque d’investissements à la suite de la dégringolade à un prix ridiculement bas de 10$/b en 1998 (l’essence hors taxe était moins chère que l’eau minérale!). Les raffineries et tankers américains sont au maximum de capacité. Le culte du zéro stock a des inconvénients. Les consommateurs sont en fait le principal coupable, en voulant consommer toujours plus et payertoujours moins.

La production des pays produisant à pleine capacité (le monde hors le Golfe Persique) culmine et va bientôt décliner. Le Golfe Persique nécessite des investissements importants et les champs supergéants vont bientôt décliner aussi. Les prix atteignant plus de 35$/b montrent qu’il n’y a plus de capacité disponible de production nulle part. Combien de temps faudra-t-il pour en retrouver ?

Il est peu probable que le prix descende sous les 25$/b sauf si la consommation faiblit significativement et durablement comme en 1979, car les économies d’énergie sont considérables. Les Américains consomment deux fois plus d’énergie que les Européens (8 tep/a contre 3,4). En effet il y a peu d’alternative au pétrole, si ce n’est le gaz. Le renouvelable ne peut le remplacer dans les 20 prochaines années car le solaire et l’éolien ne sont que des énergies d’appoint. Seul le nucléaire peut contribuer à répondre à une demande croissante.

Les nouvelles techniques pétrolières permettent d’accélérer la production de pétrole conventionnel, mais pas les réserves, par contre la technologie est un atout majeur dans l’exploitation des pétroles non-conventionnels qui demandent des investissements considérables et des délais beaucoup plus importants que le conventionnel.

Les prévisions de demande pétrolière sont trop optimistes, car la croissance de la population se ralentit. La population de l’Europe va décliner, sauf immigration importante.

La consommation de pétrole et de gaz a déjà plafonné en 1979 à 7 bep/hab (1 tep/hab) et elle culminera bientôt de nouveau vers 6,5 bep/hab vers 2005 pour décliner à 5 bep/hab en 2030. Nos petits-enfants devront se contenter de peu de pétrole et de gaz. L’age d’or du pétrole a disparu avec le millénaire. Nous entrons dans celui du gaz, mais pas pour longtemps.

Les réserves de pétrole et de gaz accumulées pendant plus de 500 millions d’années seront consommées en deux siècles, ce qui est bien peu dans l’histoire de l’humanité.

La société de consommation basée sur l’énergie bon marché et sur la croissance doit accepter de payer l’énergie à son juste prix et de l’économiser. Elle doit donc changer et évoluer.

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Sites avec quelques de mes papiers:


Liste des figures: